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La Cour suprême du Canada ordonne à la Couronne d'ajuster les paiements de traité : Ontario (procureur général) c. Restoule

Photo du rédacteur: John StefaniukJohn Stefaniuk

Dernière mise à jour : 4 nov. 2024

En 1850, les Anishinaabe des lacs Huron et Supérieur ont conclu des traités avec la Couronne. En échange de la cession de leurs terres, les Anishinaabe ont reçu, entre autres, la promesse de paiements annuels sous forme d'annuités.

Le nom Anishinaabe est le plus souvent utilisé pour désigner le peuple Ojibwé, et de nombreux autres groupes s'identifient comme Anishinaabe, notamment les Chippewa, les Odawa, les Algonquins, les Nipissing et les Mississauga, ainsi que les Oji-Cree et les Métis. À l'époque, les paiements annuels s'élevaient à moins de 2 $ par personne; cependant, ces traités contenaient des termes qui en sont venus à être appelés « clauses d'augmentation ». Les clauses d'augmentation stipulaient que la Couronne pouvait exercer son pouvoir discrétionnaire pour augmenter l'annuité annuelle tant que la Couronne ne subissait pas de pertes. Le montant annuel versé à chaque membre individuel était limité à 1 £, ou « toute somme supplémentaire que Sa Majesté pourrait gracieusement ordonner ». Cette obligation était énoncée dans le traité Robinson-Huron comme suit :


Je, William Benjamin Robinson, au nom de Sa Majesté, qui désire traiter généreusement et équitablement tous ses sujets, promets et convient que si le territoire cédé par les parties du deuxième part produit à un moment futur un montant permettant au gouvernement de cette province, sans subir de pertes, d'augmenter l'annuité qui leur est ainsi garantie, alors et dans ce cas, celle-ci sera augmentée de temps à autre, à condition que le montant versé à chaque individu ne dépasse pas la somme d'une livre de monnaie provinciale en une seule année, ou toute somme supplémentaire que Sa Majesté pourrait gracieusement ordonner.

Les annuités ont été augmentées à 4 $ par personne en 1875, mais n'ont jamais été augmentées depuis.

En 2001, les bénéficiaires du traité concernés ont lancé une réclamation contre l'Ontario et le Canada, demandant une déclaration selon laquelle les paiements de traité auraient dû être augmentés au fil du temps. Ils ont également demandé la confirmation que la réclamation n'était pas barrée par la loi ontarienne sur la limitation des actions. Enfin, ils cherchaient à obtenir des dommages-intérêts et à faire quantifier ces dommages, ainsi qu'un ordre sur la manière dont la responsabilité du paiement des dommages devrait être répartie entre l'Ontario et le Canada. Une grande partie de la réclamation était basée sur les bénéfices reçus par le Canada et l'Ontario pour les terres cédées. Les questions ont finalement été entendues par la Cour suprême du Canada, dont la décision unanime rédigée par le juge Jamal a été rendue le 26 juin 2024. À ce moment-là, les bénéficiaires du Robinson-Huron avaient réglé leur réclamation contre le Canada et l'Ontario pour 10 milliards de dollars. Les bénéficiaires du Robinson-Superior n'avaient pas réglé et demandaient 126 milliards de dollars en compensation. Concernant la question des délais, la Cour a décidé que la législation sur les délais de l'Ontario ne s'applique pas aux traités; par conséquent, la réclamation des Premières Nations n'était pas prescrite.

Sur la question principale de la responsabilité, la Cour a conclu que la Couronne avait l'obligation de s'acquitter de son devoir d'exercer avec diligence le pouvoir discrétionnaire approprié dans l'application des clauses d'augmentation et de considérer les augmentations des paiements annuels en conséquence. La Cour a établi que, bien que la Couronne n'ait pas de devoir fiduciaire en faveur des bénéficiaires du traité, elle avait néanmoins un devoir en vertu des traités de respecter ses promesses. Pour le Canada et l'Ontario, agir autrement serait contraire à l'honneur de la Couronne et rendrait leurs obligations de traité « vides ». Le Canada et l'Ontario étaient donc tenus de participer à un processus visant à déterminer un montant pour compenser les bénéficiaires du Robinson-Superior pour les violations passées de la clause d'augmentation depuis 1875 jusqu'à présent. Étant donné que l'application des clauses d'augmentation était décrite dans les traités comme étant discrétionnaire, la Cour n'a pas déterminé de dommages-intérêts pour violation de promesse. La Cour a plutôt ordonné à la Couronne d'exercer son pouvoir discrétionnaire par le biais d'un engagement honorable avec ses partenaires de traité afin de parvenir à un montant de paiement approprié. Les parties ont eu six mois pour compléter ce processus. La Cour a également affirmé que la détermination par la Couronne du montant à verser, par l'intermédiaire de l'exécutif, ainsi que son raisonnement dans cette détermination, seraient soumis à un examen par les tribunaux. Cet examen par les tribunaux garantirait que la Couronne exerce son pouvoir discrétionnaire conformément à ses obligations de traité et au principe constitutionnel de l'honneur de la Couronne. Enfin, si les parties ne parvenaient pas à un accord, la détermination finale de la compensation pourrait être renvoyée devant les tribunaux.


Les traités sont des accords reconnus constitutionnellement entre les peuples autochtones et la Couronne. Les peuples autochtones n'avaient pas l'intention de céder leurs terres, mais concevaient plutôt les traités comme des promesses, un partage et un soutien mutuel.

Ce que cette décision signifie en dehors de l'Ontario est l'objet de nombreuses discussions et de litiges en cours.


Tout d'abord, la législation sur la limitation des actions varie d'une province à l'autre. Certaines législations provinciales sur la limitation comportent une « clause de panier » qui empêche toute réclamation présentée après une certaine période.


Deuxièmement, le langage varie d'un traité à l'autre. La plupart des provinces de l'Ouest du Canada relèvent des « traités numérotés » conclus entre le Canada et les Premières Nations entre 1871 et 1921. Ils sont tous similaires dans leur format, mais il existe des variations dans le langage.


Par exemple, le traité 1 prévoit des paiements annuels comme suit

 … payer à chaque famille indienne de cinq personnes la somme de quinze dollars en monnaie canadienne, ou en proportion équivalente pour une famille plus grande ou plus petite, ce paiement devant être effectué en articles tels que les Indiens en auront besoin : couvertures, vêtements, tissus (couleurs variées), ficelle ou pièges, au prix coûtant courant à Montréal, ou autrement, si Sa Majesté juge cela désirable dans l'intérêt de son peuple indien, en espèces.

Le langage du traité 7 est encore différent :

Sa Majesté … fera en sorte que soit versé …, en espèces, … à chaque Chef, vingt-cinq dollars, à chaque Chef ou conseiller mineur …, quinze dollars, et à tout autre … cinq dollars; cette somme, à moins qu'il n'y ait une raison exceptionnelle, devant être versée aux chefs de famille pour ceux qui leur sont rattachés

Ce qui est parfaitement clair, c'est que cette décision dirige les tribunaux au Canada sur la manière d'interpréter les traités historiques. Ils ne doivent pas être interprétés de manière stricte ou technique. Toute ambiguïté doit être interprétée en faveur des peuples autochtones. Les tribunaux doivent être sensibles aux différences de langage et à la signification des mots pour les parties au moment où le traité a été signé.


L'interprétation correcte doit être celle qui réconcilie le mieux les intérêts des deux parties au moment de la signature du traité. Le processus d'interprétation doit présumer l'honneur de la Couronne. Le tribunal doit d'abord considérer la gamme des interprétations possibles, puis examiner ces interprétations dans le contexte historique et culturel du traité. Les traités doivent être considérés comme des accords nation à nation.


L'examen et l'interprétation continus des traités par les tribunaux au Canada devraient avoir des implications profondes sur le partage de la richesse des ressources et sur le règlement des obligations historiques non satisfaites.

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